Et si le dosage des IgE spécifiques dans l’allergie au venin d’hyménoptères ne servait à rien ???

mercredi 3 février 2016 par Dr Cécilia Nocent2791 visites

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Et si le dosage des IgE spécifiques dans l’allergie au venin d’hyménoptères ne servait à rien ???

Et si le dosage des IgE spécifiques dans l’allergie au venin d’hyménoptères ne servait à rien ???

mercredi 3 février 2016, par Dr Cécilia Nocent

Intérêt de la concentration des IgE spécifiques pendant une immunothérapie prolongée au venin de guêpe. :
Marta Piantanida, Laura Primavesi, Stella Forti and Elide A. Pastorello

dans Clinical and Molecular Allergy201513:29
DOI : 10.1186/s12948-015-0036-6

 Contexte :

  • L’immunothérapie aux venins (VIT) est un traitement efficace pour les patients ayant présenté des réactions allergiques systémiques après piqûre d’hyménoptères ; cependant il y a peu d’études concernant l’intérêt de la modification du taux d’IgE spécifiques pour décider de la fin de l’immunothérapie.
  • Les auteurs ont évalué les modifications des IgE pendant les 5 ans de désensibilisation chez des patients piqués et protégés pendant les 3 premières années (SP 0-3) ou pendant les deux dernières années (SP 3-5), et chez les patients non piqués (NoS) pour évaluer la possible corrélation entre les modifications d’IgE et la protection clinique.

 Méthodes :

  • L’étude porte rétrospectivement sur des patients allergiques à la guêpe jaune ayant suivi une VIT pendant 5 ans.
  • Les niveaux d’IgE de base, à 3 ans et à 5 ans étaient comparés et tous les patients étaient interrogés sur leurs piqûres et les réactions présentées.

 Résultats :

  • 232 allergiques à la guêpe vespula ont été inclus et divisés en plusieurs groupes : 84 non repiqués, 72 piqués et protégés dans les 3 premières années de la VIT et 76 piqués et protégés dans les deux dernières années de la VIT.
  • Les taux d’IgE diminuent au cours de la désensibilisation par rapport au niveau de base (χ2 = 346.029, p<0.001).
  • Les piqûres récentes d’hyménoptères s’accompagnent d’un niveau plus élevé d’IgE quelque soit la protection clinique.
  • Les taux d’IgE après 5 ans de VIT sont significativement corrélés avec les grades cliniques de Mueller (F = 2.778, p=0.012) et l’âge (F=6.672, p=0.002).
  • Pendant le suivi entre 1 et 10 ans après l’arrêt de la VIT, 35.2% des patients contactés rapportent au moins une piqûre sans réaction générale.

 Conclusions :

  • Les critères d’arrêt d’une désensibilisation à la guêpe vespula après 5 ans ne reposent pas sur un taux indétectable d’IgE spécifiques, malgré une protection prolongée.
  • La décroissance des IgE est en moyenne entre 58 et 70% par rapport au niveau de départ et cela est moins marqué chez les sujets âgés ou chez les sujets ayant présenté une réaction systémique correspondant à un grade élevé de Mueller.

Cette étude italienne parue dans la revue « Clinical And Molecular Allergy » s’intéresse à une question que tous les allergologues pratiquant l’immunothérapie spécifique aux hyménoptères se posent : peut-on suivre l’efficacité de notre traitement et même décider de son interruption sur l’évolution de la valeur des IgE spécifiques ?

Cette étude est certes rétrospective mais concernent 232 allergiques à la guêpe vespula, désensibilisés pendant 5 ans et suivis ensuite. Tous les patients avaient présenté une réaction systémique. Ils avaient tous bénéficié de dosages initiaux d’IgE puis au moins à 3 et 5 ans. Ils ont tous été interrogés sur d’éventuelles piqûres au cours de la désensibilisation, sur leur réaction à ce moment et même après la fin de l’immunothérapie spécifique.

Les auteurs ont noté que chez tous les patients en cours de VIT, les IgE diminuent.
Les taux d’IgE diminuent moins chez les patients ayant présenté les réactions les plus sévères et ce d’autant qu’ils sont plus âgés. Les taux d’IgE ne deviennent pas indétectables et pourtant les patients rapportent des piqûres sans réaction systémique pendant la VIT mais également après la fin de la VIT ce qui confirme l’efficacité de ce traitement bien conduit.

Cet article montre donc (s’il fallait encore le démontrer) que la VIT est efficace pour protéger des patients allergiques ayant présenté des réactions sévères et que cette protection se poursuit bien au-delà de la fin de la VIT.

Les auteurs montrent également qu’il n’est pas fiable de suivre le taux d’IgE spécifiques pour décider ou non de la poursuite de la VIT. Cette étude laisse donc entendre que le suivi du taux d’IgE spécifiques n’est pas un bon marqueur de réponse au traitement et de protection obtenue. Les auteurs suggèrent donc de poursuivre le traitement pendant les 5 ans habituels, de doser bien sûr en début et en fin de traitement les IgE spécifiques mais qu’il ne serait pas raisonnable d’arrêter la VIT en cours de route uniquement sur l’évolution du taux d’IgE.

On peut également se demander si en terme d’économie de santé il est licite de recommander des dosages annuels d’IgE spécifiques en cours de VIT si cela ne doit pas modifier la prise en charge du patient.

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