Chez l’enfant obèse, il faut rendre au RGO ce qui est au RGO...et pas à l’asthme !

mercredi 2 mars 2016 par Dr Philippe Carré1413 visites

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Chez l’enfant obèse, il faut rendre au RGO ce qui est au RGO...et pas à l’asthme !

Chez l’enfant obèse, il faut rendre au RGO ce qui est au RGO...et pas à l’asthme !

mercredi 2 mars 2016, par Dr Philippe Carré

Reflux gastro-oesophagien et aggravation du contrôle de l’asthme chez les enfants obèses : un cas de mauvaise attribution des symptômes ? : Jason E Lang1, Jobayer Hossain2, Janet T Holbrook3, W Gerald Teague4, Benjamin D Gold5, Robert A Wise6, John J Lima7

dans Thorax 2016 ;71:238-246 doi:10.1136/thoraxjnl-2015-207662

 Contexte :

  • Les enfants obèses rapportent, pour des raisons inconnues, plus de symptômes d’asthme
  • L’asthme et l’obésité sont associés tous les deux de façon indépendante aux symptômes de reflux gastro-oesophagien (SRGO)
  • Savoir si l’obésité affecte le lien entre SRGO et asthme aidera à élucider le phénotype obésité-asthme.

 Objectif :

  • Les auteurs veulent étendre les travaux qu’ils ont réalisés précédemment pour déterminer le degré d’association entre les SRGO et le phénotype asthmatique.

 Méthodes :

  • Les auteurs ont conduit une étude transversale chez des enfants âgés de 10 à 17 ans, soit maigres (20%-65% d’index de masse corporelle (IMC), soit obèses (≥95% d’IMC), ayant un asthme persistant à début précoce
  • Ont été réalisés chez les participants une analyse démographique, des questionnaires sur le RGO et l’asthme, et une étude de la fonction respiratoire
  • Ont été déterminées les associations entre le poids, les SRGO et l’asthme, en utilisant une méthode de régression multivariable linéaire et logistique
  • Les résultats ont été confirmés dans une seconde cohorte bien caractérisée d’enfants asthmatiques.

 Résultats :

  • Les enfants obèses avaient des odds sept fois plus élevés de symptômes multiples de RGO (OR=7.7, IC à 95% 1.9 à 31, p=0.004)
  • Les symptômes d’asthme étaient étroitement associés avec les scores de SRGO chez les patients obèses (r=0.815, p<0.0001), mais pas chez les patients maigres (r=0.291, p=0.2 ; p interactif=0.003)
  • Des plus grands scores de SRGO étaient associés avec un pourcentage de VEMS prédit plus élevé (p=0.003), une résistance plus basse des voies aériennes (R 10, p=0.025), une amélioration de la réactance des voies aériennes (X10, p=0.005), mais un contrôle de l’asthme significativement plus mauvais (Questionnaire de Contrôle de l’Asthme, p=0.007)
  • Une association significative mais plus faible entre les SRGO et les symptômes d’asthme était mis en évidence chez les sujets maigres par rapport aux obèses dans la seconde cohorte.

 Conclusions :

  • Les SRGO ont plus de probabilité d’être associés à l’asthme chez les enfants obèses
  • Une meilleure fonction respiratoire chez les enfants rapportant un RGO et des symptômes d’asthme suggère qu’une mauvaise attribution des SRGO à l’asthme peut être un mécanisme contribuant à l’excès de symptômes d’asthme chez les enfants obèses.

Cette étude montre que la mesure des symptômes de RGO (SRGO) par un test validé en pédiatrie : le GSAQ, est étroitement associée à des symptômes d’asthme plus importants en particulier chez les enfants obèses ; de plus, parmi ces enfants obèses, le GSAQ était associé de façon importante à la dyspnée et l’utilisation des bétamimétiques de courte action (BCA).

De façon inattendue, des scores plus élevés de GSAQ étaient étroitement associés à une amélioration de la fonction respiratoire.

Dans les études antérieures, le RGO est associé à l’asthme chez 43% à 87% des enfants asthmatiques, et cette étude suggère ici que presque tous les enfants obèses ayant de l’asthme ont des symptômes variés liés au RGO, quand on les interroge par un questionnaire validé.

L’ensemble des données de cette étude sont en désaccord avec le fait que le RGO induit directement ou résulte d’un asthme vrai, et suggèrent qu’il faut raisonner différemment pour comprendre correctement la relation entre le RGO et l’asthme ; les SRGO, survenant davantage chez les enfants obèses, semblent être faussement attribués à l’asthme et contribuent au fait de rapporter plus souvent de l’asthme parmi les sujets obèses.

La relation entre RGO et asthme devrait être évaluée plus en profondeur en terme de perception, d’attribution et de prise en charge des symptômes ; le RGO n’entraîne pas toujours de l’asthme d’un strict point de vue physiopathologique, mais apparaît conduire au signalement de symptômes par les patients, en particulier chez les enfants obèses qui ont plus de SRGO.

Aider les sujets à distinguer les SRGO de véritables symptômes bronchiques est très important, et permettra de diminuer les abus de prises de médicaments (BCA) et donc d’effets secondaires, et de réduire l’escalade thérapeutique dans le traitement de fond.

Ces données sont en accord avec un cercle perfide dû à la mauvaise attribution des symptômes de RGO : surdosage en BCA avec effet délétère sur le sphincter inférieur de l’oesophage, qui augmente le RGO, qui entraîne des symptômes thoraciques, puis davantage de BCA et de RGO ; ceci explique que les asthmatiques obèses utilisent beaucoup plus de BCA que les asthmatiques maigres.

Cette étude montre une relation inverse entre les SRGO et la fonction respiratoire, ce qui peut être relié au fait que les enfants obèses ayant de l’asthme ont une perception différente des symptômes : perception accrue du tonus des voies aériennes et sensation accrue de dyspnée qui ne sont pas totalement expliquées par la sévérité de la maladie.

Des mesures plus spécifiques et plus adaptées du contrôle de l’asthme sont nécessaires dans ces situations cliniques, et les interventions devraient être centrées chez les sujets obèses sur la possibilité d’arriver à ce qu’ils puissent distinguer le véritable asthme des comorbidités qui lui sont associées.

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