Traiter le reflux et c’est « toux » !

mercredi 26 mars 2003 par Dr Arnaud Scherpereel40157 visites

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Traiter le reflux et c’est « toux » !

Traiter le reflux et c’est « toux » !

mercredi 26 mars 2003, par Dr Arnaud Scherpereel

La toux chronique représente un motif fréquent de consultation. Un reflux gastro-œsophagien, évoqué dès l’interrogatoire du patient, est une cause classique de la toux. Des explorations à visée diagnostique ou un traitement d’épreuve du reflux peuvent alors être proposés en première intention.

Toux Chronique et Reflux gastro-œsophagien : Evaluation d’un traitement spécifique du reflux à visée diagnostique et thérapeutique. : Robert H. Poe, MD, FCCP and Michael C. Kallay, MD, FCCP * From the Pulmonary Unit, Highland Hospital, Strong Health System, and the University of Rochester School of Medicine and Dentistry, Rochester, NY. dans Chest. 2003 ;123:679-684

 Objectif de l’étude : évaluer l’utilisation d’un traitement par un inhibiteur de la pompe à protons (IPP), plus ou moins associé à un agent prokinétique, dans le diagnostic et le traitement de la toux induite par un reflux gastro-œsophagien (RGO).

 Méthode et patients :
* une revue de 214 patients suivis en consultation de pneumologie pour une toux de 3 semaines minimum sur une période de 3 ans et demi.
* Les patients présentant une toux induite par un RGO furent identifiés et traités suivant un protocole établi.
* 183 patients présentant une toux chronique furent inclus dans l’étude ; 31 patients furent exclus pour cause d’anomalies radiographiques thoraciques, d’un suivi inadapté, ou devant une plainte initiale autre que la toux.
* Le diagnostic de toux induite par un RGO fut retenu chez 56 patients. Ces derniers ont reçu un IPP en une prise quotidienne. Un agent prokinétique était associé si une dysfonction ou une pathologie œsophagienne était suspectée ou si la réponse au traitement n’était pas satisfaisante.
* Les patients en échec thérapeutique ont bénéficié d’une pH-métrie des 24 heures.

 Résultats  :
* le RGO était la seule étiologie de la toux chez 24 patients (43%) ;
* une autre cause était associée au RGO chez 29 patients (52%) ;
* 3 patients avaient plus de 2 étiologies de la toux autres que le RGO (5%).
* 24 patients (43%) présentaient une toux isolée, alors que 32 patients (57%) avaient d’autres symptômes de RGO.
* Le traitement par IPP a été efficace chez 42 patients (79%), soit seul chez 24 patients, soit associé au metoclopramide ou au cisapride chez 18 patients. Les 2 patients restants ont répondu à un traitement par anti-histaminique H2 ou au cisapride seul.
* La toux a disparu ou régressé nettement chez 38 patients (86%) après 4 semaines de traitement, et après 8 semaines pour les 6 autres patients.
* Six des sujets non-répondeurs présentaient une inhalation secondaire au RGO, diagnostiquée par endoscopie.
* Une fundoplicature a été proposée chez 4 patients, deux patients ayant répondu à un traitement alternatif.

 Conclusions :
* Quatre à 6 semaines d’une prise en charge par inhibiteur de la pompe à protons, seul ou associé à un agent prokinétique, a permis 4 fois sur 5 le diagnostic et le traitement de toux induite par un RGO.
* Une pH-métrie des 24 heures confirmera le diagnostic chez les autres patients. Ces derniers peuvent être candidats à un traitement chirurgical (fundoplicature).
* Les patients non répondeurs présentaient souvent une inhalation de liquide gastrique ou une pathologie œsophagienne comme facteur aggravant.


Devant la fréquence du RGO dans les étiologies de toux chronique, cette étude propose une démarche diagnostique et thérapeutique commune, simple, plus économique et efficace dans 80% des cas, par l’institution d’un traitement d’épreuve par inhibiteur de la pompe à protons, seul ou en association. Le recours à la pH-métrie de 24h, aux autres explorations digestives et aux traitements plus complexes (chirurgie…) est ainsi limité aux patients non-répondeurs.

Les limitations de cette étude comprennent le nombre relativement réduit de patients, l’association d’autres étiologies de toux que le RGO chez certains sujets étudiés (tabac, asthme, rhinorrhée postérieure…) ; on notera enfin que la posologie utilisée d’IPP était 2 à 4 fois celle recommandée dans un RGO non compliqué en France (40mg/j omeprazole ou 30mg/j lansoprazole).

Cependant, ce travail a le mérite de confirmer la valeur de la démarche assez répandue consistant à proposer un traitement d’épreuve du RGO devant une toux chronique associée ou non à une symptomatologie de RGO.

Ceci permet d’être rapidement efficace sur la toux du patient et d’ éviter souvent des explorations complémentaires désagréables et coûteuses comme la pH-métrie ou l’endoscopie.

Il faut tempérer la proposition des auteurs en rappelant que toute toux chronique justifie néanmoins un minimum d’examens (radiographie standard de thorax+++, bilan allergologique, avis ORL…) orientés par l’anamnèse (tabagisme ?+++, altération de l’état général…) et l’examen clinique du patient.

Ainsi, dans leur étude, la toux chronique des sujets était plus souvent secondaire à une rhinorrhée postérieure, un asthme, une infection des voies aériennes qu’à un RGO isolé.

De plus, toute suspicion d’œsophagite ou de pathologie ulcéreuse nécessitera une endoscopie digestive haute pour affirmer le diagnostic et adapter le traitement (majoration de la posologie des IPP…).

Enfin, les auteurs soulignent logiquement la primauté de l’institution de règles hygièno-diététiques ( perte de poids, éviter le tabac, l’alcool et le café…) sur tout médicament dans le traitement du RGO.

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