Urticaire chronique idiopathique : au régime ?

jeudi 7 janvier 2010 par Dr Céline Palussière11221 visites

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Urticaire chronique idiopathique : au régime ?

Urticaire chronique idiopathique : au régime ?

jeudi 7 janvier 2010, par Dr Céline Palussière

Le journal Allergy n’a pas de pitié pour les patients atteints d’urticaire chronique idiopathique : au régime sec ! Est-ce vraiment mieux que les médicaments au long cours ? Peut-être, mais…

Effets d’un régime sans pseudo-allergènes sur l’urticaire chronique idiopathique : étude prospective. : M. Magerl 1 , D. Pisarevskaja 1 , R. Scheufele 2 , T. Zuberbier 1 & M. Maurer 1

1 Allergie-Centrum-Charité, Department of Dermatology and Allergy ; 2 Institute of Biometry and Clinical Epidemiology, Charité– Universitätsmedizin Berlin, Berlin, Germany

dans Allergy
Volume 65 Issue 1, Pages 78 - 83

 Contexte :

  • l’urticaire chronique idiopathique est une pathologie difficile à prendre en charge, qui peut durer plusieurs années.
  • Les pseudo-allergènes sont des substances qui peuvent provoquer des réactions d’hypersensibilité/intolérance semblables aux réactions réellement allergiques.
  • Il s’agit des additifs alimentaires, des substances vaso-actives telles que l’histamine, et d’autres composants des fruits, légumes et épices.
  • L’élimination des pseudo-allergènes de l’alimentation peut diminuer la sévérité des symptômes et améliorer la qualité de vie des patients.

 Objectifs :

  • évaluer l’effet d’un régime sans pseudo-allergènes sur l’activité de la maladie et la qualité de vie de patients souffrant d’urticaire chronique idiopathique.

 Méthodes :

  • Les sujets de l’étude souffraient d’une urticaire chronique idiopathique modérée à sévère ne répondant pas correctement à une première ligne de traitement. Ils ont suivi un régime sans pseudo-allergènes pendant trois semaines.
  • Les sujets tenaient un journal clinique dans lequel ils notaient quotidiennement leurs éruptions et l’intensité de leur prurit, conduisant à l’établissement d’un score clinique de sévérité de l’urticaire chronique idiopathique (UAS4 score).
  • Ils remplissaient aussi le DLQI, instrument validé de mesure de la qualité de vie.
  • L’usage des antihistaminiques et des glucocorticoïdes était minimisé, enregistré et analysé.
  • Les sujets étaient classés dans cinq catégories de réponses, en fonction de la modification du score de sévérité (UAS4 score), de la qualité de vie (DLQI) ou de la consommation médicamenteuse.

 Résultats :

  • Sur 140 sujets, il y avait 20 (14%) bons répondeurs et 19 (14%) répondeurs partiels.
  • De plus 9 patients (6%) diminuaient leur consommation médicamenteuse sans noter d’aggravation de leurs symptômes ou de leur qualité de vie.

 Conclusions :

  • Le régime sans pseudo-allergènes est bénéfique pour un patient sur trois.
  • Il s’agit d’un régime sûr, sain et d’une mesure peu onéreuse pour identifier les sujets qui tireront bénéfice à éliminer les pseudo-allergènes.

Cette étude prospective vise à évaluer l’efficacité d’un régime dépourvu de pseudo-allergènes alimentaires, suivi pendant trois semaines, chez 140 sujets atteints d’urticaire chronique idiopathique.

L’évaluation est basée sur des scores de sévérité de la maladie, de qualité de vie et de consommation médicamenteuse.

Sur les 140 patients, 48 (34%) étaient bons répondeurs ou répondeurs partiels, ce qui permet les auteurs d’encourager la recommandation de ce régime « sans risque ».

L’urticaire chronique idiopathique est en effet difficile à vivre pour le patient, dont la qualité de vie est nettement altérée, sur de longues périodes. Elle l’est aussi pour le médecin, qui se trouve limité à prescrire un traitement symptomatique, dont l’efficacité demeure parfois insuffisante et les effets purement suspensifs.

L’idée de proposer un régime « sans pseudo-allergènes » est donc séduisante : on peut ainsi définir une stratégie d’action avec le patient. Celui-ci devient acteur de sa prise en charge, ce qui est bon pour le moral, souvent atteint dans cette pathologie…

Les auteurs remettent ainsi une liste d’aliments interdits : confiseries, épices, additifs divers et variés, alcool, aliments libérateurs de substances vaso-actives (la liste est longue)… Ces évictions nombreuses rendent le régime compliqué et certainement difficile à tenir au long cours. L’article ne précise pas si ce régime doit être poursuivi au-delà des trois semaines… si tel était le cas, l’effet positif sur le moral pourrait être plus limité !

On peut regretter que cette étude prospective ait été menée sans groupe témoin. En effet l’urticaire, même chronique et sévère, peut s’amender avec le temps. Un tiers des patients s’est trouvé amélioré : mais est-ce grâce au temps ou au régime ?

De plus les scores cliniques et médicamenteux ont été établis à la fin des trois semaines de régime, sans recul à court ou moyen terme. La possibilité d’une rechute n’est pas prise en compte.

En définitive, proposer un régime dépourvu de pseudo-allergènes, en faisant le postulat que l’urticaire chronique du patient est liée à une fausse allergie alimentaire, peut être un outil à proposer à certains patients particulièrement demandeurs et motivés. La durée de ce régime reste toutefois à préciser. Il peut aussi être considéré comme un régime d’épreuve, permettant d’asseoir le diagnostic de pseudo-allergie alimentaire.

Ce régime est cependant particulièrement contraignant et les données de l’étude ne permettent pas d’en affirmer formellement l’efficacité. Il reste donc difficile de le recommander largement.

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