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S’il vous plait les enfants, arrêtez de rougir sous antibiotiques…
mercredi 18 mai 2011, par
Prévalence de réactivité dans les tests cutanés aux antibiotiques, dans une population pédiatrique. : Kamboj, Sonia1 ; Yousef, Ejaz ; McGeady, Stephen ; Hossain, Jobayer
dans : Allergy and Asthma Proceedings, Volume 32, Number 2, March/April 2011 , pp. 99-105(7)
– Contexte :
- Bien que les réactions adverses aux médicaments (RAM) ne soient pas rares, les réactions authentiquement allergiques (c’est à dire immunologiques) restent peu fréquentes.
- Les réactions réellement allergiques sont estimées à seulement de 10% des patients de disant allergiques à la pénicilline.
- La plupart des études sur les RAM liées aux pénicillines ont été menées dans des populations adultes et suggèrent que la majorité des adultes ayant une histoire d’allergie aux pénicillines peuvent recevoir ce médicament en toute sécurité.
– Objectifs :
- Le but de cette étude était d’examiner les résultats de tests de provocation médicamenteux aux antibiotiques dans une population pédiatrique et corréler le résultat à des facteurs prédictifs.
- A travers l’étude de dossiers, nous avons identifié 96 enfants ayant une histoire de RAM aux antibiotiques, qui ont bénéficié de tests cutanés (TC) et/ou des réintroductions progressives aux pénicillines (n=52), céphalosporines (n=7), azithromycine (AZT ; n=24), ou clindamycine (n=4).
– Résultats :
- Parmi ces enfants avec RAM, 87 (90.6%) on toléré le test de provocation médicamenteux et 9 (9.4%) ont eu comme consigne de poursuivre l’éviction en raison de tests cutanés positifs ou de test de réintroduction positif.
- Huit des neuf patients ont poursuivi l’éviction médicamenteuse en raison de TC positifs pour la pénicilline (n=4) ou en raison de RAM au cours de la réintroduction (n=4).
- Toutes les réintroductions à l’AZT et aux céphalosporines étaient négatives, et un seul patient n’a pas subi de test de réintroduction à la clindamycine en raison d’un TC positif.
– Conclusion :
- Une réelle “allergie aux antibiotiques”, démontrée par des TC positifs ou un test de provocation positif chez les patients ayant une histoire de RAM est apparue chez moins de 10% des enfants inclus dans cette étude, suggérant que sans tests, près de 90% d’entre eux pourraient être traités avec des antibiotiques alternatifs de façon non nécessaire.
Les auteurs de cette étude américaine ont étudié le nombre de bilans allergologiques (tests cutanés et/ou test de réintroduction) pour les pénicillines, chez 96 enfants ayant présenté une réaction adverse médicamenteuse. Ces données étaient en effet disponibles pour les adultes, et ils ont voulu évaluer le pourcentage d’authentiques allergies dans une population pédiatrique.
Sur ces 96 enfants, seulement 9 ont eu un bilan positif : tests cutanés ou test de réintroduction positifs. La prise d’antibiotique a donc été autorisée pour tous les autres, pour lesquels de diagnostic d’allergie était abusif. Ces données sont tout à fait comparables avec les résultats d’autres études portant sur les adultes, dans une population non sélectionnée.
Faut-il tester toutes les suspicions d’allergies aux pénicillines ? Lorsqu’on a en tête le pourcentage de réactions authentiquement allergiques par rapport à toutes les déclarations des patients, on se dit que l’on pourrait simplifier la vie de 90% de ces sujets (et celle de leur médecin traitant).
Cependant l’idée d’avoir à tester toutes les suspicions d’allergie peut faire frémir l’allergologue, tant ces affirmations sont fréquentes...
Pourtant les pénicillines sont classées parmi les médicaments “indispensables” : leurs indications sont larges, et particulièrement dans de nombreuses infections graves mettant en jeu le pronostic vital.
Une éviction de principe, par prudence... est donc en soi une aberration. Si elle ne pose pas de problème pendant de nombreuses années, chez le sujet sain, elle peut avoir des conséquences catastrophiques lorsqu’il s’agit de traiter en urgence une méningite bactérienne par exemple.
Les tests cutanés pour les bêta-lactamines sont maintenant bien codifiés, standardisés. Leurs performances ne sont certes pas parfaites (sensibilité autour de 80% et spécificité autour de 70%), mais ils permettent de bien avancer dans le diagnostic. Une étude de P. Demoly montrait en effet que parmi les tests faussement négatifs, aucune réaction grave n’avait été déplorée dans sa série.
L’équipe de Montpellier nous permet ainsi d’avoir des bases solides pour proposer des tests fiables et informatifs à nos patients.
Mais l’idéal serait bien sûr de limiter les faux diagnostics, portés abusivement sur les carnets de santé à la moindre éruption sous antibiotique... Car nous risquons sinon de crouler sous les IDR !
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