Conseiller médical en environnement intérieur : un métier utile.

dimanche 8 septembre 2002 par Pr Frédéric de Blay11141 visites

Accueil du site > Pratique > Malades > Conseiller médical en environnement intérieur : un métier utile.

Conseiller médical en environnement intérieur : un métier utile.

Conseiller médical en environnement intérieur : un métier utile.

dimanche 8 septembre 2002, par Pr Frédéric de Blay

Le métier de conseiller médical en environnement intérieur fait partie de ces "nouveaux métiers" que l’évolution galopante de l’allergie a créés. Quel est-il ?

Au cours des quinze dernières années, la mise au point de méthodes de mesure des allergènes domestiques a permis :
* de démontrer les liens entre exposition allergénique de l’habitat et symptômes d’allergie,
* d’apprécier avec plus de rigueur l’effet des méthodes d’éviction des allergènes.

A la lumière des études publiées, seule l’éviction globale, c’est-à-dire de tous les réservoirs d’allergènes en contact avec le patient, était cliniquement efficace.

Pour pouvoir réaliser de façon la plus exhaustive cette réduction de l’exposition allergénique, il est rapidement apparu que les médecins spécialistes et généralistes n’avaient ni le temps ni la formation pour proposer des conseils d’éviction orientés par les résultats des tests de mesure des allergènes.

Ainsi, il fallait des personnes capables de se rendre au domicile du patient, de réaliser un audit de qualité de l’environnement intérieur, de proposer des conseils d’éviction en fonction des niveaux d’exposition mesurés et des habitudes culturelles du malade.

C’est pourquoi, une nouvelle activité professionnelle, les Conseillers Médicaux en Environnement Intérieur (C.M.E.I.) a été créée en 1991 à Strasbourg.

Son rôle a été dans un premier temps de proposer des mesures d’éviction des allergènes d’acariens.

Grâce à une étude prospective, randomisée, multicentrique, réalisée en 1999 et 2000, comprenant 378 patients provenant de Marseille, Montpellier, Paris et Strasbourg (en collaboration avec l’Association Asthme) nous avons pu démontrer l’utilité des C.M.E.I.

En effet, le suivi par les patients des conseils d’éviction donnés par des spécialistes et par les C.M.E.I lors de visites à domicile était supérieur à celui obtenu par des médecins seuls. De plus, la réduction de l’exposition allergénique était supérieure dans le groupe médecin plus conseillère que dans celui médecins seuls. Ce travail est actuellement soumis pour publication.

Les C.M.E.I sont des professionnels qui aident les médecins à la fois dans le diagnostic et le traitement des maladies respiratoires et allergiques liées à l’air intérieur.

En effet , la démarche diagnostique en pathologie respiratoire et allergique liée à l’environnement revient à relier à la fois une histoire clinique évocatrice et la présence inconstante d’un biomarqueur à la mise en évidence du polluant suspecté dans l’habitat du patient.

Cette démarche, inspirée de celles entreprises en pathologie professionnelle permet une fois le diagnostic posé, d’envisager les mesures de réduction de l’exposition vis à vis de l’agent responsable de la pathologie.

Cependant, elles ne seront pratiquées que sur les sources et supports du polluant incriminé, permettant ainsi la réalisation d’une éviction ciblée.

Par cette double fonction d’aide au diagnostic et au traitement, les C.M.E.I. participeront à l’éducation du patient asthmatique comme cela a été souligné dans les Recommandations pour la Pratique Clinique : « Education thérapeutique du patient asthmatique- Adulte et adolescent » de l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation en Santé.

De part cette position privilégiée, les C.M.E.I. feront le lien entre les soignants, le malade, les professionnels du bâtiment et certains acteurs institutionnels, devenant ainsi des éléments essentiels d’un réseau dans la prévention des pathologies respiratoires liées à l’environnement intérieur.

Une telle activité professionnelle nécessite :
* une connaissance des pathologies médicales en rapport avec les polluants présents dans l’habitat,
* de grandes qualités relationnelles
* des connaissances techniques du bâtiment, de la ventilation et de la métrologie des différents polluants (allergènes, endotoxines, moisissures, C.O.V ou NO2…), de façon à réaliser un audit de la qualité de l’air intérieur,
* des connaissances sur les différentes méthodes d’éviction des différents polluants.

Actuellement, 12 C.M.E.I. ont obtenu le Diplôme Universitaire de Strasbourg de Conseiller Médicaux en Environnement Intérieur (105 heures d’enseignement).

Trois exercent en Belgique, une au Portugal.

En France, ils ou elles travaillent soit au sein de CHU, soit comme titulaires (à Strasbourg), soit comme emploi-jeune (Strasbourg, Nancy et bientôt Besançon et Montpellier).

Le pré-requis pour la formation est un niveau bac plus deux ou trois. Le plus souvent, il s’agit d’infirmièr(e)s, de technicien(ne)s ou de conseillères en économie sociale et familiale.

Dans le futur, cette activité professionnelle pourrait être développée dans les hôpitaux, les services d’hygiène des villes, les DDASS et les associations de malades.

Grâce à l’observatoire de la qualité de l’air intérieur, des données métrologiques concernant des nouveaux polluants de l’air intérieur (chimique ou biologiques) vont être disponibles.

Parallèlement, des travaux récents soulignant leur rôle potentiel des endotoxines et de certaines substances chimiques dans l’apparition ou l’aggravation des maladies respiratoires vont conduire les médecins à s’intéresser de plus en plus aux pathologies liées à l’habitat, et par conséquent à faire appel aux C.M.E.I. Ce qui leur permettra d’inclure dans leur investigation d’autres techniques de mesure que celles des allergènes et à s’intéresser à d’autres sources de polluants.

Parallèlement à la prise en charge d’une pathologie existante, les C.M.E.I. pourront intervenir comme acteurs de contrôle de la qualité sanitaire d’un logement, soit pour l’obtention d’aide à la rénovation de bâtiments anciens, soit pour la déclaration du caractère insalubre d’un logement.

Ainsi, les C.M.E.I. représentent une nouvelle activité professionnelle complémentaire d’une formation initiale qui doit s’intégrer au sein d’un réseau des différentes professions qui ont trait aux maladies respiratoires liées à l’environnement intérieur.

La qualité de leur formation et leur connaissance des limites de leur champ d’intervention sont des gages pour un développement harmonieux de ces nouveaux acteurs de soins.