Je m’encens pas bien

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Je m’encens pas bien

Je m’encens pas bien

vendredi 14 mars 2025, par Dr Philippe Auriol

Exposition aux composés organiques volatils et mortalité liée aux maladies respiratoires chroniques : une étude cas-cohorte

Les maladies respiratoires chroniques (MRC) sont la troisième cause de décès dans le monde, avec une forte prévalence de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) et de l’asthme. La pollution de l’air, y compris l’exposition aux composés organiques volatils (COV), est un facteur de risque majeur, mais peu d’études épidémiologiques ont analysé l’impact des COV sur la mortalité due aux MRC dans la population générale. Cette étude explore l’association entre l’exposition aux COV mesurée par biomarqueurs urinaires et le risque de décès par MRC.

Exposure to volatile organic compounds and chronic respiratory disease mortality, a case-cohort study Nalini et al. Respiratory Research (2025) 26:88

Méthodes

  • Population étudiée : Étude cas-cohorte menée dans la Golestan Cohort Study (Iran), incluant 50 045 participants âgés de 40 à 75 ans recrutés entre 2004 et 2008.
  • Cas et cohorte de référence : 242 décès dus aux MRC jusqu’en 2018 ont été inclus comme cas. Un sous-groupe de 610 participants a été sélectionné aléatoirement pour servir de comparaison.
  • Biomarqueurs : 20 biomarqueurs urinaires de COV ont été mesurés par chromatographie liquide ultra-haute performance couplée à la spectrométrie de masse (UHPLC-MS/MS).
  • Modèle statistique : Modèle de régression de Cox stratifié, pondéré par l’inverse de la probabilité d’échantillonnage et ajusté pour divers facteurs de confusion, incluant le tabagisme (urinaire cotinine et pack-years).

Lien sur la méthode UHPLC-MS/MS : Chromatographie UHPLC-MS/MS

Résultats

  • Données analysées : 149 cas de décès par MRC (69,1 % BPCO, 13,4 % asthme, 17,5 % autres maladies respiratoires) et 545 participants de la sous-cohorte.
  • Association avec la mortalité par MRC :
    • Acroléine (2CoEMA) : Augmentation du risque de décès dans le tertile supérieur (HR = 3,53 ; IC 95 % : 1,53-8,16, p-trend = 0,002).
    • Styrène/éthylbenzène (MADA) : Association significative avec un HR de 3,24 (IC 95 % : 1,37-7,66, p-trend = 0,005).
  • Robustesse des résultats : Ces associations sont restées significatives après exclusion des quatre premières années de suivi pour réduire le biais de causalité inverse.

Discussion

  • Confirmation du risque des COV : Ces résultats confirment les effets néfastes de certains COV sur la santé respiratoire, indépendamment du tabagisme.
  • Acroléine et stress oxydatif : L’acroléine, présente dans la fumée de tabac, les huiles chauffées et la combustion de biomasse, est un agent toxique documenté pour son effet délétère sur les poumons.
  • Styrène/éthylbenzène et maladies pulmonaires : Utilisé dans les plastiques et les solvants, ce composé n’était jusqu’ici pas considéré comme un facteur majeur de risque respiratoire. Cette étude apporte des preuves nouvelles d’une relation avec la mortalité par MRC.
  • Forces et limites de l’étude :
    • Forces : Données de cohorte populationnelle avec longue durée de suivi, mesure objective des biomarqueurs, ajustement rigoureux des facteurs de confusion.
    • Limites : Une seule mesure urinaire des biomarqueurs (variation intra-individuelle non prise en compte), impossibilité de différencier les sources environnementales des COV.

Conclusion

Cette étude met en évidence le rôle potentiel des COV, en particulier l’acroléine et le styrène/éthylbenzène, dans la mortalité liée aux MRC. Elle souligne l’importance de la surveillance environnementale et de la prévention des expositions aux COV, notamment dans les environnements industriels et domestiques. Des recherches complémentaires sont nécessaires pour préciser les mécanismes impliqués et identifier des stratégies de réduction du risque.


Un air pur c’est un air auquel on a rien ajouté. Cette règle de bon sens a parfois du mal à passer. Iil faut dire que nos patients ne sont pas aidés : du naturopathe au pharmacien en passant par la grand-mère il y a toujours quelqu’un pour conseiller de rajouter un truc dans l’air pour aller mieux.

Alors non, vous ne pouvez pas mieux respirer en ajoutant quelque chose dans votre air : huiles essentielles diffusées, bougies parfumées, encens, tabac et désodorisants sont autant de toxiques qui vont altérer davantage votre appareil respiratoire. Cette étude le rappel, mais c’est une évidence.

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